Villers-Outréaux... un village presque comme les autres

Faits divers

 

Tribunal correctionnel de Cambrai
Audience du 28 février 1829.

Un homme jeune encore vient s'asseoir sur le banc des prévenus. Sa longue redingote est noire, ses cheveux courts sur le devant de ta tête lui tombent longs et plats sur la nuque et derrière les oreilles ; une voix renforcée, une prononciation pleine d'emphase et de pédanterie lui donnent quelque chose de ce cinglant, grand partisan de l'ancienne méthode et auquel la bêtise amusante de l'acteur Brunet a su acquérir une si grande réputation. Il y a aussi du Basile, dans ces yeux équivoques, constamment baissés, qui ne se lèvent que pour jeter un regard de haine et de vengeance sur les témoins défavorables à sa cause. Mais, en somme, c'est au benin M. Tartufe qu'il ressemble d'avantage. Rien n'y manque le maintien plein d'affectation et de forfanterie, le teint frais et la bouche vermeille, et jusqu'à l'oreille rouge, sont là pour rendre complète la ressemblance physique. Passons maintenant à la ressemblance morale. Le récit des faits de la prévention vont l'établir de manière à prouver que le maître d'école de Villers-Outréaux ne le cède pas en hypocrisie au personnage de Molière.
Le sieur Marly, épicier à Villers-Ontréaux, ordonna, il y a quelques mois, à son fils Ferdinand d'aller à l'école chez Henri Dewailly ou monsieur Henri, comme on l'appelle dans le village. L'enfant se mit à pleurer et supplia son père de ne point le forcer à lui obéir. Le père insista, et l'enfant, tout en larmes, dit alors que monsieur Henri lui avait ordonné de voler du sucre et d'autres objets d'épicerie dans la boutique. Comme je n'ai pu le faire, ajouta-t-il, je serai battu. Marly crut que son fils mentait pour ne pas aller à l'école, et il répéta l'ordre qu'il lui avait donné, quand son fils aîné vint se mettre à ses genoux Papa, dit-il, si vous promettez de me pardonner, je vous avouerai la vérité. Ce que mon frère vous dit n'est pas un mensonge ; car moi j'ai été forcé par monsieur Henri de vous voler pendant trois mois du sucre, des épiceries, et même de l'argent. C'est pour cela que je n'ai plus voulu aller à l'école. Le père se rappela alors diverses circonstances qui ne prouvaient que trop la vérité du récit de son fils. Plus d'une fois il s'était aperçu de la diminution du sucre qu'il avait en boutique ; plus d'une fois son argent avait disparu sans qu'il pût deviner la main qui le lui dérobait. Accusant sa femme de ces larcins, il l'avait même rudement battue un jour dans cette supposition.
Le sieur Marly, affligé bien moins des vols commis à son préjudice que des funestes leçons données à ses enfants, porta plainte aussitôt à M. le maire, qui la transmit à M. le procureur du roi.
29 témoins ont été entendus dans cette cause ; 3 d'entre eux paraissaient avoir parfaitement retenu la leçon du maître d'école et ce n'est pas sans hilarité qu'on a entendu ces trois témoins répéter presque mot pour mot, chacun à leur tour, une déposition divisée méthodiquement en deux points, et ornée de phrases à mourir de rire. Le tribunal les fit recommencer, et pas une syllabe ne fut changée, pas une inflexion de voix ne subit la plus légère variation.
Après l'audition des 29 témoins il était deux heures. L'audience fut remise à l'après-diner pour entendre l'avocat et le ministère public.
A cette seconde audience, et après des plaidoiries qui durèrent jusqu'à sept heures, le tribunal se retira dans la chambre du conseil, et, après dix minutes de délibération rentra pour faire connaître son jugement.
Il condamne Henri Dewailly à deux années de prison, et sa mère, la femme Quiévreux à la même peine, comme coupable de recélé ; tous les deux à 100 d'amende.

Article du Courrier des tribunaux de mars 1829

 

 

On lit dans la Gazette de Cambrai : « Il est d'usage de faire, une procession solennelle, le jour de l'Ascension, dans la commune de Villers-Outréau. A cette occasion ; il y a émulation parmi les habitants pour faire le plus beau reposoir. Jeudi dernier donc tout se disposait pour que la cérémonie fût brillante ! Jeunes filles et jeunes garçons, en habits de fête, étaient à leur poste pour escorter la procession. Elle sort, mais en changeant son itinéraire habituel, de sorte que le dernier reposoir qu'elle devait visiter se trouve le premier sur son passage. Ceux qui le construisaient étaient en retard, ils ne connaissaient pas ce changement de dispositions. Ils se bâtent, les draperies flottent au vent, l'autel se couvre de fleurs et de linge fin. La procession n'est plus qu'à quelques pas, le chant des prêtres et des fidèles se fait entendre, on s'empresse d'allumer les bougies ; mais cet excès de précipitation est fatal, le feu prend à une draperie, et, en un instant, il ne reste plus des ornemens, des étoffes, de la charpente que quelques charbons ardens et des cendres que le vent disperse. La perte ne laisse pas que d'être assez considérable. Article du journal "Le Constitutionnel" du 26 mai 1852

 

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L'Emancipateur raconte qu'un huissier de cette ville ayant à opérer une arrestation dans la commune de Villers Outreaux, avait requis deux gendarmes pour lui prêter main forte, et le commissaire de police du canton, dont dépend cette commune. En arrivant, le garde-champêtre est à son tour mis en réquisition pour indiquer l'endroit où se trouve l'individu que cherchait l'huissier. On apprend qu'il est pour le moment à travailler au fond d'un puits, à 38 mètres au dessous du sol. Vraisemblablement notre homme remonterait à l'heure de midi, mais on est impatient d'en finir, et on croit avoir trouvé un moyen de le ramener à l'orifice, c'est de lui annoncer que l'autorisation sollicitée par lui pour tenir une épicerie et un débit de boissons est arrivée. On se rend à l'entrée du puits, et on lui crie cette grande et importante nouvelle, mais il a compris que c'était un piége et il répond immédiatement "Bien obligé, mais j'ai changé d'idée, je ne veux plus être épicier ni cabaretier, je reste ici." Que faire ? On cherche à le persuader, il persiste à refuser la faveur qu'on lui propose. On fait suspendre la marche de la ventilation établie pour renouveler l'air au fond du puits, notre homme grimpe quelques mètres pour échapper aux exhalaisons malsaines, on le menace de descendre, il attend résolument l'huissier, il fallut bien se résigner,. Quand le soleil fut couché, la liberté se releva pour lui, et il put impunément sortir du puits. L'huissier, le commissaire et les gendarmes étaient retournés à vide. C'est une expédition à recommencer. Article du Temps du 21 novembre 1864

 

1864 : Pour échaper aux poursuites judiciaires, le Sieur La Joie, escroc, met le feu à sa maison.

 

1885 : 13 juillet. "On se souvient du drame du boulevard Haussmann et de son dénouement récent devant la cour d'assises de la Seine Le docteur Quinet, de Charleroy, avait tenté de tuer l'amant de sa femme, avec laquelle celui-ci s'était enfui ; il fut acquitté par le jury.

On se rappelle que Mme Quinet ne parut pas au procès; on avait en effet, perdu sa trace, et le bruit avait couru qu'elle s'était réfugiée en Amérique. Il n'en est rien ; Mme Quinet est dans l'Aisne. Voici les curieux renseignements que donnent à ce sujet les journaux de Saint-Quentin.

En quittant Paris, après le coup de revolver qui a puni Auguste Bayot, Mme Quinet ne s'est pas enfuie en Amérique comme on le disait. D'abord réfugiée à Marle, qu'elle a quitté, elle vint enfin échouer à Villers-Outréaux (Aisne). Après avoir habité quelques jours chez un sieur G. L. débitant, elle trouva que sa liberté n'était pas assez grande et elle s'installa à une des extrémités du village, dans une maison presque solitaire.

Mme Quinet, en arrivant à Villers-Outréaux, se fit passer pour une couturière, femme d'un ferblantier habitant Paris ; sa faible santé obligeait son mari à l'envoyer passer quelque temps à la campagne, bien à regret, car peu de ménages étaient aussi unis que le leur. Aux regrets causés par cette séparation momentanée se joignait le chagrin de ne pas voir chaque jour quatre fils faisant leurs études dans les lycées de Paris. Pendant les premiers temps, Mme Quinet fréquentait l'église d'une façon édifiante ; dans les derniers jours, elle renonça à cette habitude. Les paysans malins constatèrent que sa dévotion prit fin à l'arrivée d'un jeune homme que Mme Quinet voulait faire passer pour son neveu, mais que personne ne connaissait dans la commune bien qu'il se prétendît d'un village distant de très peu de kilomètres de Villers-Outréau. C'est un grand dadais, aux manières rustiques, habillé d'un pantalon et d'une blouse en toile, coiffé d'une casquette. Dans la nuit de lundi à mardi, le docteur Quinet descendait à Bohain, accompagné d'une dame, prenait une voiture et se faisait conduire à Villers-Outréaux. En arrivant dans le village, le docteur se fit donner quelques renseignements et, accompagné d'une femme du pays, se rendit à l'habitation de son infidèle épouse. La dame ayant frappé au contrevent, le colloque suivant s'engagea :

Mme Quinet : Qui est là ?

La dame : Ouvrez, j'ai un renseignement à vous demander.

Mme Quinet : Que me voulez-vous ? Je ne vous connais pas, je n'ouvrirai pas.

La dame : Je désire un renseignement que vous seule pouvez me fournir. Veuillez ouvrir, je ne vous veux aucun mal.

Aux premières paroles prononcées par sa femme, le docteur Quinet avait dit à voix basse « C'est bien elle. »

La porte s'ouvrit enfin, mais la dame qui accompagnait le docteur Quinet lui ayant posé une question, ce dernier commit l'imprudence de répondre à haute voix. Mme Quinet, reconnaissant son mari, s'écria «Emile ! Emile ! à mon secours ! on veut m'assassiner !» Puis elle s'enfuit dans la direction du village, dans un costume presque primitif, les cheveux épars sur le dos. M. Quinet et sa compagne s'élancèrent à sa poursuite et la rattrapèrent au bout de quelques pas. L'Emile avait disparu ; sa trace n'a pas été retrouvée.
Un entretien d'une demi-heure eut lieu entre Mme Quinet, son mari et la dame qui l'accompagnait. La conférence fut d'un calme parfait ; aucun mot n'a été entendu du dehors.

Article du journal " le Temps" du 13 juillet 1885

 

1910 : 20 janvier. A Villers-Outréaux, un père de famille, M. Wuiot, pénétrant, pendant une leçon d'histoire, dans la classe de l'instituteur, enjoignit à ce dernier de retirer des mains des élèves un livre d'histoire condamné. L'instituteur s'y refusa en déclarant :
-€” Je n'ai pas d'ordre à recevoir de vous ; d'ailleurs, ce livre n'est pas mauvais.
Le père saisit alors le livre en question, cracha dessus, le déchira, puis le piétina. Et s'adressant à l'instituteur, M. Wuiot s'écria :
-" Vous avez fait de vos enfants des anarchistes (!) ; je n'ai pas envie que vous en fassiez autant des miens. »
Puis se tournant vers les élèves, il ajouta :
-" Les enfants, il faudra tous faire comme moi "
M. Dessaint, inspecteur primaire, saisi de cet incident, en a avisé l'autorité académique qui, enfin, serait disposée à déposer une plainte au parquet. Article du journal "l'Aurore" du 20 janvier 1910

 

 

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